Nouvelle ère politique à Madagascar : entre espoir et vigilance, l’analyse du père Cyprien Razafinandraina

Un tournant politique majeur

Un petit rappel des faits : après plusieurs semaines de manifestations entamées le 25 septembre 2025, la situation politique malgache a connu un tournant décisif. L’ancien président Andry Rajoelina a été exfiltré par un avion militaire français à la suite du ralliement de l’armée aux manifestants. Depuis, le colonel Michaël Randrianirina, à la tête du Corps d’Armée des Personnels et des Services Administratifs et Techniques (CAPSAT), a prêté serment le 17 octobre 2025 comme président de la Refondation de la République de Madagascar. Il promet une réforme en profondeur des systèmes de gouvernance administrative, socio-économique et politique. Cette transition s’ouvre toutefois dans un climat de méfiance internationale, l’Union africaine ayant suspendu Madagascar de ses instances, tandis que l’ONU appelle au respect des principes démocratiques.

Pour le père jésuite Noël-Marie Cyprien Razafinandraina, de la Compagnie de Jésus à Madagascar, la rapidité des événements a surpris plus d’un. « On ne s’attendait pas à ce que les choses aillent aussi vite, après seulement deux à trois semaines, alors que d’autres crises ont duré des mois », a-t-il expliqué à Radio Vatican. On rappelle souvent que le CAPSAT avait déjà joué un rôle clé en 2009 en soutenant l’accession au pouvoir d’Andry Rajoelina. Mais, cette fois, les acteurs sont différents, affirme le père Cyprien Razafinandraina. Le colonel Randrianirina n’était pas connu du monde politique. Il est intervenu au bon moment pour soutenir les manifestants, ce qui a précipité son ascension.

Entre satisfaction et prudence

Malgré un sentiment de soulagement perceptible au sein de la population après la chute de l’ancien régime, le père Cyprien Razafinandraina invite à la prudence. « Tout changement apporte espoir, mais il faut toujours être prudent quand il s’agit de politique », a-t-il averti. En effet, la question de la légitimité du nouveau pouvoir demeure. S’agit-il d’un coup d’État ou d’un salut pour le peuple ? Les avis sont partagés ». Le père jésuite souligne les priorités qui attendent le nouveau régime. Sur le plan politique, il plaide pour une meilleure répartition du pouvoir : « Notre système donne trop d’autorité au président, tant sur le plan politique qu’économique. Il faut repenser cet équilibre », a-t-il estimé. Sur le plan social, les besoins urgents sont nombreux. L’accès à l’eau et à l’électricité reste un défi majeur pour une grande partie de la population. « Nous avons les moyens d’y remédier, notamment en exploitant nos rivières et nos fleuves pour la production d’énergie hydroélectrique », a-t-il souligné.
Le domaine de l’éducation constitue un autre enjeu essentiel, selon le prêtre. « Le niveau éducatif est très bas », a-t-il affirmé. Ainsi, il faut investir massivement dans l’éducation et la formation, car elles conditionnent le développement du pays.